Bouygues Télécom demandait réparation des préjudices que lui aurait causés l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) dans le cadre de ses missions de régulation et de contrôle de l’accord d’itinérance Orange-Free entre les années 2012 et 2015. Par jugement du 29 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête
Par une décision du 12 janvier 2010, l’ARCEP avait attribué à la société Free mobile la quatrième licence de téléphonie mobile de troisième génération (3G). Cette autorisation imposait à la société Free mobile de déployer son propre réseau 3G et d’assurer une couverture étendue du territoire mais lui attribuait également certains droits, parmi lesquels un droit d’accès en itinérance au réseau 2G de l’un des trois opérateurs existants (Orange, SFR, Bouygues Télécom) pour une durée fixée à six ans. Un accord d’itinérance a ainsi été conclu en mars 2011 : Orange autorisait Free à accéder, moyennant rémunération, à son réseau 2G mais également 3G jusqu’en 2016 ou 2018.
Selon Bouygues Télécom, l’absence d’encadrement de cet accord d’itinérance par l’ARCEP jusqu’en 2015 a induit des effets anticoncurrentiels déloyaux. Cette remise en cause du principe d’une concurrence par les infrastructures qui prévalait dans le secteur de la téléphonie mobile l’aurait directement impactée. L’itinérance dont la société Free mobile a bénéficié, sans que l’ARCEP n’intervienne, aurait permis à l’entreprise de mener une stratégie commerciale agressive du fait notamment d’un sous-investissement dans le déploiement de son propre réseau.
Le tribunal a tout d’abord jugé que seule une faute lourde pouvait engager la responsabilité de l’Etat du fait d’une carence de l’ARCEP dans l’exercice de ses missions de régulation et de contrôle. Il a ensuite relevé que, si l’ARCEP avait méconnu l’étendue de ses pouvoirs en rejetant par principe la possibilité d’encadrer l’accord d’itinérance conclu entre Free et Orange, aucune faute lourde ne pouvait lui être reprochée au cours de la période en cause s’agissant :
- du contrôle du respect par Free de son obligation de déployer son propre réseau,
- de l’absence d’encadrement de l’accord d’itinérance conclu, la politique tarifaire pratiquée par Free mobile lors de son arrivée sur le marché n’étant pas uniquement imputable à l’itinérance 2G/3G dont elle bénéficiait, mais résultant également de choix commerciaux faits par la société,
- et de l’absence d’intervention de l’ARCEP pour contrôler la pratique dite de bridage ciblé (ralentissement du chargement de contenus multimédia pour décourager les utilisateurs et limiter ainsi le coût de l’itinérance) que la société Bouygues Télécom reprochait à Free mais qui n’a pas été démontrée.
Lire le jugement n° 1605470/5-2
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