La DGCCRF a pu légalement enjoindre à Amazon de modifier ses contrats avec les vendeurs tiers

Décision de justice
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Le tribunal administratif de Paris reconnaît la compétence du ministre de l’économie pour enjoindre sous astreinte à la société Amazon de modifier les conditions générales d’utilisation par les vendeurs tiers du site « amazon.fr ». Il annule cependant les injonctions portant sur certaines clauses qui, selon lui, ne créent pas de déséquilibre significatif dans les relations contractuelles et réduit en conséquence l’astreinte.

Le 15 décembre 2021, faisant pour la première fois application des dispositions du code de commerce prohibant le déséquilibre significatif dans les relations contractuelles (1) , la DGCCRF a enjoint à la société Amazon, sous astreinte de 90 000 euros par jour de retard, de modifier plusieurs clauses des contrats régissant les conditions d’utilisation du site « amazon.fr » que les vendeurs tiers doivent signer pour vendre leurs produits sur ce site. La société Amazon a saisi le tribunal d’une requête tendant à l’annulation de cette décision.

 

Le litige posait en premier lieu la question de la compétence de la France pour s’immiscer dans une relation contractuelle entre une société de droit luxembourgeois et des vendeurs tiers qui, pour la plupart, sont situés à l’étranger. Le tribunal a jugé que, dès lors que le site internet « amazon.fr » s’adresse à une clientèle française et permet aux vendeurs tiers actifs sur ce site de vendre et de livrer des produits à des clients français situés en France, il existe un lien de rattachement pertinent au territoire français, qui permet au ministre d’appliquer le droit français des pratiques restrictives de concurrence aux contrats noués entre la société Amazon et les vendeurs tiers.

 

Le tribunal a également été amené à se prononcer sur l’articulation entre le code de commerce et le règlement européen du 20 juin 2019, dit « Platform to Business » (PtoB). Il a jugé que, dès lors que ce règlement prévoit que les États membres conservent toute latitude pour appliquer les dispositions de droit interne interdisant les comportements unilatéraux ou les pratiques commerciales déloyales, l’administration pouvait appliquer de manière cumulative les dispositions du code de commerce et celles du règlement PtoB, à la condition que le droit national ne méconnaisse pas le droit européen.

 

Enfin, amené à examiner les neuf clauses dont la DGCCRF demandait la modification, le tribunal a jugé que cinq étaient conformes tant au code de commerce qu’au règlement PtoB. Il s’agissait, en particulier, des clauses relatives à la « garantie de A à Z », à l’interdiction pour les vendeurs tiers de prospecter la clientèle hors du cadre des transactions conclues via le site « amazon.fr », et du service « expédié par Amazon ». Il a en revanche estimé que quatre clauses, et en particulier celles permettant de manière discrétionnaire à la société Amazon de modifier, suspendre ou résilier le contrat sans préavis, d’interdire de la vente certains types de produits sans motif clairement défini, créaient effectivement un déséquilibre significatif entre les cocontractants.

 

Par conséquent, le tribunal a annulé la décision de la DGCCRF enjoignant à Amazon de modifier les cinq clauses conformes au code du commerce mentionnées ci-dessus, et réduit de 90 000 à 50 000 euros par jour le montant de l’astreinte journalière fixée en cas d’inexécution de la décision d’injonction

 

 

Lire le jugement : 2206656

 

Contact presse : communication.ta-paris@juradm.fr

 

 

 (1)L. 470-1 du code de commerce dans sa version issue de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière.